La vie par courrier en 14...

Nicolas Savy a écrit:En fait, je voulais vous en parler parce que ce bouquin c'est pas le genre de truc que je fais habituellement, on est loin de l'étude historique sur la guerre de 100 ans. C'est 3 familles amies qui m'ont confiée la correspondance de leur aïeul, des documents divers les concernant et les histoires de famille qui leur étaient parvenues. Bref, j'ai pu suivre ces trois gars assez précisément durant leur parcours, décrypter leurs pensées par rapport à certains évènements, tout ça quoi. En ce qui me concerne, j'en ai tiré une vision plus proche du quotidien, car quand tu regardes par les yeux d'un gars, tout devient important, tant ce qu'il y avait sur le front qu'à l'arrière.
Le gars qui écrit à sa femme "qu'il ne pourrait être mieux" alors qu'il est dans les tranchées de Champagne, au Hurlus, en décembre 15.
-L'autre qui juste avant de monter à l'assaut du côté de Cumières, à Verdun en mars 16, écrit à ses parents que tout va bien mais qu'ils ne doivent pas lui envoyer d'argent (il a toujours peur du gaspillage).
-Ou cet autre qui écrit à un ami, en rentrant de perm, qu'il pense que "tout va bien se passer" et qui est gazé le soir même et mort le lendemain....
Bref, si un jour vous avez la chance de retomber sur des paquets de lettres, ne vous contentez pas de les lire dans le désordre, mais servez-vous en pour refaire l'histoire du gars : c'est passionnant.

Nicolas Savy a écrit:
Lettre de Jean-Pierre à sa femme,alors qu'il est soigné pour ses gelures à l'hôpital de Carcassonne en janvier 15 :
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Lettre de Gabriel à sa tante, après son baptème du feu en août 14 où il a été blessé :
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Une lettre du 3e, Jean-Pierre, à sa femme alors qu'il est en train de ramasser dans les tranchées des Hurlus, décembre 14. Il sera évacué pieds et mains gelés quelques jours plus tard :
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Un autre, Gabriel Dubreil, printemps 15 :
2e en partant de la droite.
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Nicolas Savy a écrit:J'en ai parlé ailleurs, mais comme tout le monde a pas dû voir : dans ses lettres, un des gars dont j'ai écrit l'histoire parlait souvent de son meilleur pote, un gars qui dans le civil habitait un village voisin. Les gueuletons de retour de perm, les discutions sur le pays, etc...

Bref, comme j'avais son nom, prénom et lieu de résidence, j'ai fait une petite recherche téléphonique et, dès le premier coup de fil, je suis tombé dans la famille de ce gars, et au 2e je discutais avec son petit-fils ! Le mec était tout surpris que je lui dise précisément où son grand-père avait combattu, avait été fait prisonnier, etc... Je dois le rencontrer bientôt car il a des photos à me prêter.

Je suis peut-être un peu trop sentimental, mais j'étais vraiment content de réunir comme ça, à travers 100 ans et plusieurs générations, 2 copains de tranchée et de misère. L'un y est resté, l'autre pas.