Hommage à Lucien Flinois, parachutiste du 8ème BPC Mort pour la France

Bonjour à tous,

Je vous propose aujourd'hui un article sur un jeune parachutiste mort de maladie en captivité.

Lucien Flinois est né le 2 Mars 1927 dans le 12ème Arrondissement à Paris dans une famille assez pauvre. Il entretient très jeune le rêve de devenir garde forestier, lui le titi parisien perdu dans sa ville. Il ne rêve que de grands espaces, de nature. Il ne peut accéder à cet emploi réservé mais compte bien pouvoir y arriver un jour.

C'est alors que le jeune Lucien, matricule 500 au recrutement de Paris, part à l'armée. En 1948, il est breveté parachutiste à Pau. Il part quelques mois plus tard vers l'Indochine au sein du 7ème BCCP. Vers la mi-1951, il est muté à la 16ème compagnie (rouge) du 8ème Bataillon de Parachutistes Coloniaux, commandée par le lieutenant Gueguen, une figure des paras en Indo, seul officier du Corps Expéditionnaire à avoir reçu au cours d'un même séjour, la croix de chevalier et d'officier de la Légion d'Honneur. Cette compagnie est une des plus décoré de l'armée française durant la guerre d'Indochine.

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En Octobre Nghia Lo, bourgade de 30 000 habitants, est le théâtre de violents affrontements. Nghia Lo est un poste situé à 150 km au nord-ouest d’Hanoi, entre la rivière Rouge et la rivière Noire, dans une cuvette de 4 km par 10 km de côtés. La ville, qui est entourée de montagnes dont les sommets s’élèvent à 1 500 m, est traversée par la RC13 et comprend un terrain d’aviation.

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Le village de Nghia Lo vu du ciel
Photos « INDOCHINE 52-53 » - Presses de la Citée

Le 2 octobre, le 8e BPC est largué en deux vagues sur Gia Hoi (opération «Rémy»), à 20 km au nord-ouest de Nghia Lo. Son objectif est de soutenir Gia Hoi et de harceler les arrières de l'ennemi afin de soulager le dispositif de défense de la cuvette.Le jour même, le bataillon occupe le col de Ban Van. L’intervention des parachutistes précipite l’attaque sur Nghia Lo et détourne le régiment 209 de l’attaque principale.
Le 3 Octobre à 8h30, la 16e compagnie du 8e BPC est accrochée et doit se replier.

Trois jours plus tard, le 6 Octobre, tandis que le 8e BPC marche vers Tan Kouen, le 2e BEP (Bataillon Etranger Parachutiste) se porte sur Bo Sieng où il affronte violemment l’ennemi avant de prendre le contrôle des hauteurs qui dominent la piste de ravitaillement Viet Minh qui relie Khau Vac – Nghia Lo.

La 16e compagnie du 8e BPC tente une jonction avec le 2e BEP mais est violemment attaquée à 18 heures alors qu’elle atteint Tan Kouen. Le capitaine Gautier, chef de corps du bataillon, est grièvement blessé. Encerclée par le régiment vietminh 209, la 16e compagnie doit sacrifier la section Truchot afin de permettre son repli par un ravin et suivre le cours de la rivière Nam Min.

Le 2ème classe Lucien Flinois fait partie de la section du lieutenant Truchot. La section, coincée au bord d'une rivière par l'embuscade des viets résiste tant bien que mal, submergée par le nombre. Au bout d'une heure de combat intense, les hommes sont à court de munitions et sur ordres du lieutenant Truchot, ils jettent les culasses de leurs armes. Pour ces hommes commence la captivité.

Durant les quelques jours de marche qui les séparent du camp de prisonniers n'° 113, les prisonniers sont exhibés dans les villages aux populations locales. A l'arrivée au camp 113, les mauvais traitements, les simulacres de procès, les punitions qui pleuvent, les autocritiques devient leur quotidien. Au fil des jours, des mois et des semaines, de nombreux prisonniers disparaissent.

Vers le mois de Juin, Lucien Flinois est atteint de fortes fièvres et ne tarde pas à succomber. Son camarade de misère et frère d'arme, Robert Auguet, raconte :

Quand le petit Flinois, qui rêvait d’être agent forestier, est décédé, personne ne s’est porté volontaire pour l’ensevelir, malgré la promesse d’une gamelle de paddy supplémentaire. Nous commencions à ressembler à des zombis ambulants. Je me suis levé parce que je l’aimais bien, et aussi parce que cela me permettait de passer près de la cahute du lieutenant Truchot qui était près du cimetière. Blot et moi avons peiné pour traîner ce petit corps qui ne pesait pas plus de 30 kilos.

Extrait du livre de Danielle Ropars "Indochine 1947-1954" (avec l'aimable autorisation de Mr Auguet)

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Photo de la tombe d'un para de la 16ème Cie du 8ème BPC tué à Nghia Lo

C'est ainsi que disparait à seulement 25ans le 2ème classe Lucien Flinois, sans jamais avoir pu accomplir son rêve de devenir garde forestier.
Ses affaires sont renvoyées à sa famille. Lors de l'inventaire de ses affaires au service des nécropoles de Saïgon, certaines de ses affaires sont remises par erreur dans la malle d'un autre soldat mort pour la France en Indochine, Marc Sanvoisin, sergent au 7ème Régiment de Tirailleurs Algériens tué en Mars 1952.

Près de 60 années plus tard, à la fin de l'année 2008, le redécouvre dans la malle du sergent Sanvoisin, mon oncle, un brevet para. Quelques mois plus tard, le temps de faire le tri de tous les documents récupérés, je tombe sur le diplôme au même numéro que l'insigne decerné au 2ème classe Lucien Flinois.

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Après quelques jours de recherches, je retrouvais à la fois un extrait de l'interview de Robert Auguet, qui l'avait enterré au Camp 113, et les coordonnées de ce monsieur, avec l'aide précieuse d'un ami ancien d'Indo. Une semaine plus tard, j'étais à Chateauroux, à une heure de chez moi, les mains tremblante, sonnant à la porte de l'ancien survivant des camps viets. Nous avons discutés durant toute l'après midi de Nghia Lo, du Camp 113 et surtout de Flinois. Il m'a confié cette après midi là la garde de la mémoire de ce jeune para.

Lors d'une exposition fin Juin dans mon lycée, plus de 300 élèves, collégiens et lycéens, découvrirent le parcours de ce jeune para, dont le corps repose toujours à 12000 kilomètres de la France, sous la végétation luxuriante qui a reprit ses droits sur l'ancien emplacement du camp de prisonniers n°113.

Je rappelle que le taux de mortalité dans les camps viets était de 69 % pour les prisonniers du Corps Expéditionnaire Français d'Extrême Orient durant la guerre d'Indochine et 72 % pour les prisonniers de Dien Bien Phu après quatre mois de captivité.

Le brevet para et le diplôme de Lucien Flinois dans une de mes vitrines :
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cordialement,
Antoine.

Encors un brave mort en Indo.
C'est un très bel hommage que tu lui rends,bravo à toi !

Bravo et merci de nous avoir fait partager l'histoire de ce jeune parachutiste
Je me souviens encore tres bien du post de la decouverte de ce brevet para dans les effets militaires de ton grand-oncle
Que de travail accompli depuis cette decouverte, et je ne peut etre que admiratif du travail de recherche long et difficile que tu as effectué.

Bravo et Merci pour lui, ainsi que tout ceux qui sont mort loin de France, dans les camps du Vietminh
Gloire a eux et au nom de Dieu, vive la Coloniale!

Thierry